Initiatives pour une pratique écoresponsable des sports de nature

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Depuis plusieurs décennies, le concept de développement durable est intégré dans l’action du mouvement sportif et dans les politiques publiques[1]. La conviction que les acteurs du sport – participants comme institutions – ont un rôle à jouer dans la protection de l’environnement est largement répandue. Les intérêts partagés entre sports de nature et environnement font l’objet de nombreuses collaborations entre les acteurs du sport et ceux de la gestion des espaces naturels et de leur protection. En outre, les adeptes des activités Outdoor sont, en général, respectueux de l’environnement. Au-delà des appréciations subjectives, le fait est que l’on protège mieux ce que l’on connaît, et que l’engagement est renforcé par l’action.

L’écoresponsabilité du sport, plutôt mise en avant par les organisateurs d’évènements, les gestionnaires d’équipements et les responsables du milieu sportif, soutenue par le ministère en charge des Sports et l’ONG WWF, s’étend aujourd’hui aux pratiquants, écocitoyens. Grâce à diverses initiatives les adeptes des sports de nature peuvent contribuer à la préservation de leurs espaces de pratique.

L’envie d’agir

Les adeptes des sports et loisirs Outdoor représentent plus de la moitié des sportifs[2]. Premiers témoins de la dégradation des espaces naturels dans lesquels ils pratiquent, ils sont à ce titre des acteurs essentiels à prendre en compte. D’une part ils peuvent jouer un rôle dans la préservation de ces espaces. D’autre part, ils ont intérêt à ce que leurs lieux de pratique soient préservés. Ils sont donc motivés (lire à ce propos le témoignage de Nicolas Lemonnier, fondateur de Run Eco Team).

Cette considération s’ancre dans le secteur professionnel de l’Outdoor. Aujourd’hui, divers organismes initient, développent et mettent en œuvre des programmes permettant aux pratiquants de s’investir dans la pérennisation de leurs lieux de pratique.

Évènements, programmes et applications pour des adeptes de l’outdoor, engagés

Les professionnels du secteur des sports et loisirs de nature, organismes gouvernementaux ou non, ou bien des sportifs ont créé des programmes grand public qui prennent différentes formes : de l’évènement à l’application, en passant par le mouvement solidaire. Leur objectif commun est de permettre au pratiquant d’être actif, en exerçant une action concrète sur son lieu de pratique dans un objectif de préservation de celui-ci.
Format désormais bien connu, la collecte de déchets motive de nombreux sportifs. À l’instar du mouvement Run Eco Team, lancé par Nicolas Lemonnier, dont l’objectif est « 1 run, 1 waste », soit un moyen de « courir utile » grâce au plogging (course à pied antidéchet). Ce mouvement a conquis les adeptes de la course à pied à l’échelle internationale (France, Portugal, Australie, Brésil, États-Unis, etc.), il compte aujourd’hui plus de 15 000 membres. Ce type d’action directe convient également à d’autres activités. À titre d’exemple, pour les activités aquatiques, le licencié peut s’identifier auprès de la Fédération française de canoë-kayak comme Gardien de la rivière. Il s’engage ainsi à veiller sur une zone qui lui sera attribuée. MAIF Sport Planète, Odyssée Rhône Green ou encore Montagne Zéro Déchet organisé par Mountain Riders, sont des évènements qui reposent sur ce principe de ramassage de déchets. Leur but : sensibiliser le pratiquant afin qu’il poursuive cette action une fois l’évènement terminé. La popularité de ce type d’évènements en fait des outils efficaces et témoigne de l’envie d’agir des pratiquant·e·s. Lors du dernier MAIF Sport Planète, 11 300 personnes ont cumulé plus de 800 000 kilomètres en ramassant des déchets durant leur sortie.

Photo Mountain Riders

Autre geste écocitoyen : le signalement via une application, une plateforme en ligne. Il peut s’agir de remplir un court formulaire pour signaler un problème que l’on rencontre, afin d’avertir les gestionnaires qui prendront en charge la résolution du problème. Le signalement peut aussi consister à partager ses tracés GPS, ses parcours, les dangers identifiés. C’est ce que permet l’application River App aux pratiquants d’activités nautiques. En plus d’agréger les données des services hydrologiques pour offrir aux pratiquants une information fiable sur les niveaux d’eau des rivières, River app référence 2 500 parcours de kayak et avec l’aide des utilisateurs communique les signalements liés à des dangers existants. Cette application comptabilise 200 000 téléchargements, elle couvre les rivières de plus de 15 pays en Europe et en Amérique du Nord. La Mountain Bikers Foundation, avec Sentinelles MBF, ainsi que France Nature Environnement, avec Sentinelles de la nature, quant à elles, ont développé des plateformes de signalement de problèmes. L’une est à destination des cyclistes, l’autre de tous les usagers de nature. Les signalements effectués sont visibles par tout internaute. Ils sont ensuite adressés aux élus en charge de résoudre les conflits ou les dangers identifiés. À ce titre, ces plateformes constituent des outils au service des gestionnaires d’espaces, sites et itinéraires de pratique, à l’instar de Suricate, tous Sentinelle des sports de nature, lancé et piloté par le Pôle ressources national sports de nature. Cette application est utilisée par la Fédération française d’équitation via le programme Brigade Suricate : des équipes de cavaliers effectuent des signalements dès que nécessaire.

Enfin, d’autres types d’initiatives œuvrent davantage pour la sensibilisation en offrant aux pratiquants la possibilité de s’informer sur les milieux qu’ils traversent, de contribuer à la diffusion de bonnes pratiques, de soutenir des associations environnementales. À titre d’exemple, C mon Spot, piloté par l’Office français de la biodiversité et pour le moment en expérimentation sur les activités nautiques, à l’échelle de la Bretagne, permet à tous publics de s’informer sur les écosystèmes, les zones de quiétude, les comportements à adopter et même de témoigner, en partageant des photos et des vidéos. Par ailleurs, des évènements tels que Eco Trail ou Run for the oceans, organisé par la marque Adidas, invitent les participants signer et respecter une charte des bonnes pratiques ou réaliser un défi sportif pour débloquer des fonds destinés aux associations de protection de la biodiversité.

Les adeptes de sports et loisirs de nature sont sollicités pour contribuer à la préservation des espaces naturels car ils sont nombreux et sur le terrain régulièrement. Leur contribution peut s’effectuer à différents niveaux ce qui permet au plus grand nombre de s’investir, quelle que soit sa pratique, son niveau ou lieu de pratique favori.

Aperçu du document Ensemble, adaptons nos pratique, Office français de la biodiversité

Des liens à créer entre les applications ?

Le Pôle ressources national sports de nature s’appuie, lui aussi, sur la force de la « communauté » des pratiquant·e·s pour faire fonctionner deux dispositifs. Le premier est l’application Suricate, tous Sentinelle des sports de nature. À disposition de tous les pratiquants, cette application permet de signaler un problème qu’il s’agisse de balisage, de conflit d’usage, de sécurité ou d’une source de pollution. Ces signalements sont ensuite envoyés à un réseau d’administrateurs afin de traiter et résoudre les problèmes. C’est l’acte écocitoyen du pratiquant qui lance l’action et qui permet au territoire d’agir par la suite. Le pratiquant peut suivre l’avancement du traitement de son signalement. Depuis le début de l’année 2021, plus de 3 900 signalements ont été effectués, la moitié d’entre eux sont en cours de résolutions et 995 ont été traités (résolus ou classés sans suite).

Le second dispositif, c’est la plateforme Outdoorvision. Alimentée par les traces GPS (agrégées et anonymisées) des pratiquants outdoor, cette plateforme permet de former des cartes de chaleur qui permettent des analyses poussées sur les fréquentations. Il s’agit d’un outil d’aide à la décision en matière de gestion de lieux de pratique, à disposition des collectivités territoriales, fédérations sportives, gestionnaire d’espaces naturels. Par leur contribution et le don de leurs traces GPS, les adeptes des sports et loisirs de nature en sont l’élément moteur, ils permettent au dispositif d’être un outil d’observation innovant, et s’impliquent in fine dans la préservation des lieux de pratiques.

Les initiatives ici présentées suivent toutes un objectif commun : l’engagement des pratiquants pour l’amélioration de la gestion des sites de pratiques des sports de nature. C’est la raison pour laquelle des pistes pourraient être intéressantes à développer (actions de communications réciproques, mutualisation des systèmes) afin d’aboutir à des partenariats gagnant-gagnant. Dans cet esprit, un stand Suricate a été mis en place sur les Villages Green organisés par Odyssée Green lors de l’étape de lancement de l’évènement en juin 2021 à Valence.

Odyssée Rhône Green, 1er Rhône Trip écoresponsable de 60 étapes sur 3 ans, à pied, en stand up paddle et à vélo, pour débarrasser le Rhône, le Vieux Rhône, les Lônes et les abords des déchets sauvages.

Autres initiatives favorisant un comportement écoresponsable des pratiquants

Plastic Origins (projet lancé par Surfrider Foundation Europe) a pour finalité de mettre un terme à la pollution plastique des rivières et des océans, grâce au signalement des pollutions et à la cartographie les zones de provenance (à l’intérieur des terres) des déchets rejetés dans l’océan.
www.plasticorigins.eu

Ghost Med (programme scientifique porté par l’Institut Méditerranéen d’Océanologie (MIO/Aix-Marseille Université, CNRS, IRD) vise à créer un réseau dynamique d’usagers de la mer, afin d’évaluer l’impact des engins de pêche perdus. Le principe est que pêcheurs, plongeurs, gestionnaires d’aires marines et grand public puissent signaler via un formulaire en ligne les engins de pêche perdus dont ils peuvent avoir connaissance.
ghostmed.mio.osupytheas.fr

Notes

[1]  Quelques exemples : L’Agenda 21 du sport français. CNOSF, 18 décembre 2003 ; la politique de développement maîtrisé des sports de nature portée par le ministère en charge des Sports ; les travaux partenariaux – menés par le ministère en charge des Sports et le PRNSN, l’École nationale de voile et des sports nautiques, l’Office français de la biodiversité – en matière de conciliation de la pratique des sports de nature et de la protection du littoral (exemple : Colloque Sport, mer et littoral 2020)

[2]  Sports et loisirs de nature en France. Points de repère et chiffres clés issus du baromètre sport 2018.

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